Egeablog - Mot-clé - BD2023-06-28T12:43:19+02:00Olivier Kempfurn:md5:fc9dfa5de5fd9856c4c7bdd45e8ff3c1DotclearLe sang des cerises (Bourgeon)urn:md5:efa57904b2dc4b23d90857a5b3381f752023-02-10T11:22:00+00:002023-02-10T14:00:49+00:00Olivier KempfBDBDBourgeon<p style="text-align: justify;">Le deuxième tome du Sang des cerises est paru en novembre 2022, clotûrant le dernier épisode de la saga des <em>Passagers du vents</em>. J'en ressors avec un sentiment mitigé.</p>
<p style="text-align: justify;"><img alt="https://www.editions-delcourt.fr/sites/default/files/styles/image_list/public/product/9782413030621-001-X.jpeg?itok=GQuyQOiY" src="https://www.editions-delcourt.fr/sites/default/files/styles/image_list/public/product/9782413030621-001-X.jpeg?itok=GQuyQOiY" /></p> <p style="text-align: justify;">Nous parlons quand même de François Bourgeon, l'auteur des <em>Passagers du vent</em>. Pour les jeunes lecteurs, l'irruption de cette série dans les années 1980 (aux éditions Glénat, nouvel acteur de l'édition de BD à l'époque) avait donné sinon un coup de fouet, du moins un coup d'accélérateur à la BD de qualité, la sortant défintivement des rayons enfantins. Dargaud avait suivi en lançant la série XIII... Je collectionne des BD sérieusment depuis cette époque...</p>
<p style="text-align: justify;">Revenons à Bourgeon : les <em>Passagers du vent</em> mêlaient un beau dessin, minutieux dans les détails, réaliste dans les attitudes, empreint de poésie grâce aux vieux gréments et à la mer, un scénario original, des personnages attachants et finalement à la mentalité très contemporaine. Autrement dit, une réinvention de la BD historique qui fit florès. Bourgeon poursuivit avec deux autres séries : <em>Les compagnons du crépuscule</em>, sensationnelle plongée dans le Moyen-âge, et le <em>cycle de Cyann</em>, à dominante de science-fiction fantasy (à laquelle j'ai moins accroché). Il reprit ensuite la série des passagers du vent avec "<em>La petite fille bois Caïman</em>" puis avec cette troisième et dernière saison, "<em>Le sang des cerises</em>", dont le tome 1 est paru en 2018 et dont voici le tome 2.</p>
<p style="text-align: justify;">L'action se passe au temps de la Commune. On suit les lentes prérégrinations de Zabo la communarde qui raconte (à la fin des années 1880) à un jeune bretonne un peu perdue, Klervi, son expérience de la Commune, de la défaite, de l'emprisonnement à Versailes jusqu'au transfert à Rochefort, puis le voyage de déportation vers la Nouvelle Calédonie, le temps passé là-bas, le retour et l'ultime voyage en Bretagne.</p>
<p style="text-align: justify;">Disons les choses simplement : malgré les artifices du scénario pour relancer la "conversation", le gigantesque flash-back de Zabo paraît artificiel, verbeux et pour tout dire, ennuyeux. Ce qui était léger dans les volumes précédents est ici lourd, discursif, pesant. Et du coup, on se perd. J'ai mis du temps à m'attacher aux personnages... quant à la chute, elle peine à convaincre...</p>
<p style="text-align: justify;">Le trait reste toujours de très bonne qualité mais là encore, avec quelques pesanteurs disgracieuses, sans les illuminations ni les chocs visuels qu'on avait eus lors des premiers opus.</p>
<p style="text-align: justify;">Bref, un album que l'on conserve par amitié mais sans être réellement convaincu.</p>
<p style="text-align: justify;">O. Kempf</p>
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<p style="text-align: justify;"> </p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2023/02/10/Le-sang-des-cerises-%28Bourgeon%29#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2573La bombeurn:md5:d7de84c6e46d7e54aa1e682c245af6c82020-08-05T18:38:00+01:002020-08-05T18:38:00+01:00Olivier KempfBDBDBombeHistoireNucléaire <p>Mieux qu’une bande dessinée, ce long album de 500 pages raconte l’histoire de l’invention de la première bombe atomique et de son premier lancement opérationnel sur Hiroshima.</p>
<p><img src="https://www.glenat.com/sites/default/files/styles/large/public/images/livres/couv/9782344020630-001-T.jpeg?itok=aCevCU-q" alt="" /></p>
<p>Tout commence en 1933, lorsqu’un physicien hongrois, Leo Szilard, décide de quitter son université à Berlin, devant l’arrivée de Hitler au pouvoir, pour rejoindre les États-Unis. Là commencent les premières recherches puis, à partir de l’entrée en guerre, le lancement du projet Manhattan.</p>
<p>On croise Fermi, Heisenberg, le général Grooves et tous les autres qui ont participé, d’une façon ou d’une autre, à cette histoire. Nous connaissions leurs noms sans savoir exactement qui avait fait quoi.</p>
<p>Cet album de référence, mieux peut-être qu’un essai, nous donne à comprendre ce qui s’est passé, grâce à une documentation impeccable et un dessin (N&B) éblouissant.</p>
<p><strong>La Bombe</strong>, par Alcante, Bollée et D. Rodier, Glénat. <a href="https://www.glenat.com/1000-feuilles/la-bombe-9782344020630">Ici</a>.</p>
<p>O. Kempf</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2020/08/05/La-bombe#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2287Puisqu'il faut des hommesurn:md5:9bd355fcff73ccca06e401157c50da9c2019-12-07T16:55:00+00:002019-12-07T17:41:52+00:00Olivier KempfBDBDGuerre d AlgérieTPST<p>Alors que se profilent les fêtes de Noël et leurs cadeaux associés, égéa peut aussi contribuer à vous donner des idées de cadeaux à offrir ou à demander. Sans surprise, nous pensons à des livres ou des BD. Celle de ce jour vaut particulièrement le détour, tant elle traite avec grande délicatesse deux sujets difficiles, ceux de la guerre d'Algérie et des TPST (Troubles de stress post-traumatique).</p>
<p><img src="https://www.angle.fr/images/angle/couv_bd_fiche/9782818969076.jpg" alt="" /></p> <p>L'histoire est celle d'un jeune homme, rentrant dans son village du Massif central et étant mal accueilli par sa famille, des paysans d'une ferme écartée : en effet, Joseph encourt deux reproches : celui d’avoir laissé son frère qui a subi un grave accident et se retrouve en fauteuil roulant ; et celui d'avoir été planqué dans un bureau pendant son passage sous les drapeaux.</p>
<p>La BD montre le décalage entre l'ancien combattant et ceux qui sont restés au pays, mais aussi entre ce qu'il peut en dire et ce qu'il pense au fond de lui-même, sans même parler des images cruelles qui lui reviennent souvent à l'esprit. Comme l'on peut s'en douter, les choses sont plus compliquées mais il ne faut pas gâcher la fin.</p>
<p>Nous avons apprécié le dessin, au découpage classique, ne cherchant pas le réalisme forcené sans pour autant verser dans une abstraction trop stylée : un dessin simple, qui s'accorde pleinement avec l'ambiance terreuse et de terroir. Quant au scénario, nous avons particulièrement apprécié son traitement délicat qui montre à la fois les rudesses de tempérament mais aussi la noblesse de certains caractères.</p>
<p>La guerre d'Algérie sert de toile de fond de la BD (nous sommes en 1961) et elle est traitée non pas sous l'angle idéologique habituel, mais comme une guerre où des ennemis s’affrontent, dans des circonstances difficiles avec, comme toujours, les drames qui l'accompagnent. Quant aux TPST, ils constituent un arrière-plan central, justifiant le mutisme de Joseph qui ne parle pas de ce qu'il a vu. Si les engagements opérationnels contemporains ont rendu plus connus ces troubles, constatons qu'ils sont communs à toutes les guerres. Et si les soldats qui rentrent ne parlent pas de ce qu'ils ont vécu, ce n'est pas forcément qu'ils sont des planqués, ou des tortionnaires...</p>
<p><a href="https://www.angle.fr/bd-puisqu-il-faut-des-hommes-9782818969076.html">Puisqu'il faut des hommes</a>, par Pelaez et L. Pinel, Grand Angle</p>
<p>O. Kempf</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2019/12/07/Puisqu-il-faut-des-hommes#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2276Bienvenue au Kosovourn:md5:b746e8c24cc21c5f057715eb5ad8eda82019-10-28T14:03:00+00:002019-10-28T14:16:27+00:00Olivier KempfBDAlbanieBDBosnieConflitsKosovoMusulmanSerbie<p>Voici une BD atypique à bien des égards. Par le thème évoqué comme par le traitement à la fois scénaristique et illustratif. Cela donne un résultat curieux, qui mérite le détour sans pour autant convaincre totalement, ce qui est souvent la marque des œuvres engagées, avec beaucoup de bons côtés et quelques regrets...</p>
<p><img src="https://www.editionsartege.fr/pfs/vignettes/FIC157820HAB40.jpg" alt="" /></p> <p>L'histoire : en un mot un homme que l'on comprend rapidement être un kosovar d'origine serbe qui a refait sa vie en Italie revient, à travers la Serbie, vers le Kosovo pour aller sur la tombe de son père, récemment disparu. Il rencontre dans le train un vieux Serbe de Sarajevo, ayant lui aussi trente ans de souvenirs à faire passer. Deux tranches de vie se rencontrent jusqu'à la séparation, qui conduit le Kosovar à rejoindre Mitroviça malgré les affrontements entre communautés, albanaise et serbe.</p>
<p>Disons d'entrée que le scénario refuse le schématisme habituel qui a eu cours sur la région, opposant des méchants Serbes à de gentils Musulmans, ici en Bosnie, là au Kosovo. Les deux héros sont justement des Serbes déchirés, qui ont refusé la guerre qu'on voulait leur faire faire : l'un, marié à Sarajevo à une musulman, combat dans l'armée bosniaque tandis que l'autre refuse justement le combat (sous la critique de son père qui le traite de lâche) et revient, deux décennies plus tard essayer de retrouver son enfance disparue.</p>
<p>Cette partie là est peut-être la plus intéressante : A coup de flash-backs (trop, en fait), on se replonge dans une époque où les choses étaient plus ambiguës que beaucoup le disaient alors.</p>
<p>La deuxième partie convainc moins car alors que l'histoire exposait des nuances, elle décrit dsormais les "adversaires" (ici des kosovars albanophones donc musulmans) comme systématiquement brutaux et agressifs : autrement dit, fauteurs de guerre. Il est dommage que ce simplisme contrevienne au premier discours. La fin de la BD est d'ailleurs proprement incroyable et vient casser tous les propos de la première partie.</p>
<p>Du point de vue du dessin, l’ensemble est assez classique sans défaut majeur. Le coloriste a dû changer au milieu du travail et l'on passe d'une ambiance assez opaque à une couleur plus franche et à mon goût plus convaincante.</p>
<p>Voici donc une œuvre ambivalente, séduisante par bien des côtés, notamment le huis-clos dans le train qui permet à deux hommes de se révéler peu à peu, dans une intimité psychologique très réussie ; puis une deuxième partie beaucoup moins convaincante, marquée par l'excès d'arguments, ce qui affaiblit l'ensemble. On retiendra la volonté de tenir un discours décalé sur le sujet.</p>
<p><a href="https://www.editionsdurocher.fr/livre/fiche/bienvenue-au-kosovo-9782268102641">Bienvenue au Kosovo</a>, par Mogavino, Mirkovic et Quatrocchi, éditions du Rocher.</p>
<p>O. Kempf</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2019/10/28/Bienvenue-au-Kosovo#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2270Cryptomonnaie (Morissette et Roulot)urn:md5:0f6e4e2299254a7627fb003161f5683a2019-07-26T18:41:00+01:002019-07-27T08:35:30+01:00Olivier KempfBDBDCryptomonnaie<p>Les vacances arrivent pour beaucoup. Le moment où l'on a du temps et où l'on lit : mais du coup, quelle BD allez-vous lire pendant vos vacances ? Car arrivé sur votre lieu de villégiature, vous allez très vite aller fureter chez votre détaillant de BD habituel. Et pourquoi pas Cryptomonnaie, de D. Morissette-Phan et T. Roulot ? Car voici une BD originale à maints égards et qui vaut le détour.</p>
<p><img src="https://bitcoin.fr/wp-content/uploads/2019/05/bd-crypto-monnaie.jpg" alt="" /></p> <p>En effet, les BD traitant du cyberespace sont rares et pas toujours convaincantes. Sympathiques éventuellement, mais ça ne suffit pas. En effet, les auteurs sont confrontés au défi de devoir trouver une intrigue qui tienne la route : pour cela, elle doit obéir aux lois du suspense (parce qu'une BD, ça raconte d'abord une histoire) mais aussi à la cohérence technique du sujet traité. Or, cette dernière caractéristique est particulière au cyberespace et le distingue profondément des BD de SF car celles-ci, malgré leur nom de science, penchent surtout du coté de la fiction. Et l'on ne connaît pas par ailleurs de BD "scientifique".</p>
<p>Or, avec le cyber, la difficulté est double ; cette technologie exige des connaissances réelles qui ne sont pas à portée de tout le public ; et beaucoup des acteurs cyber sont imprégnés de culture BD.</p>
<p>Bref, construire une BD cyber, c'est compliqué, vous l'avez compris.</p>
<p>La BD dont nous parlons aujourd'hui répond à cette exigence. Confessons qu'elle parle de cryptomonnaie et qu'un minimum de culture en la matière n'est pas inutile : sans aller jusqu'à connaître le nom de Sakashi Nakamoto ni les différences entre les protocoles Bitcoin ou Ethereum, il faut savoir quand même qu'il s'agit d'un système sans tiers de confiance qui nécessite de grosses puissances de calcul pour miner la cryptomonnaie. Et puis disons le tout net : Je ne suis pas sûr que Mme Michu regardera cette BD, qui vise un public déjà un peu averti.</p>
<p>Et c'est tant mieux car du coup, l'intrigue est crédible, appuyée sur les deux ressorts de la cryptomonnaie : la technique ... et la crédulité. Et oui, une monnaie moderne est forcément "fiduciaire" : elle ne vaut que ce qu'on croit qu'elle vaut. Dès lors, tout lancement d'une cryptomonnaie suppose une grande mobilisation de marketing pour convaincre les acheteurs d’acquérir la monnaie. Plus il y a d'acheteurs, plus la monnaie vaut. La technique n'est donc pas tout, malgré les discours technolâtres des partisans des cryptomonnaies, il faut aussi de la conviction et de la persuasion : bref, travailler le cerveau humain.</p>
<p>C'est d’ailleurs là-dessus qu'est construite l'intrigue : voici une nouvelle monnaie. Le héros doit-il y croire et y placer toutes ses économies ? Doit-il entrer dans la société pour l'inciter à investir dans son village d'origine, au fin fond du Canada ? A-t-il raison de convaincre ses proches d'accueillir la nouvelle société et de la subventionner ? Doit-il écouter les avertissements méfiants d'un journaliste free-lance ? Et d'ailleurs, qui est à la tête de la société qui lance la cryptomonnaie ? la belle Kristina Orsova ? Volksh ? une bande criminelle ? Bref, un excellent techno-polar (je ne sais si le genre existe mais pour le coup, il vient d'être inventé).</p>
<p>L'auteur (Tristan Roulot) est canadien d'adoption et place donc l'action là-bas, dans une Amérique du nord qui est juste assez décalée par rapport à l'Europe ou aux États-Unis. Quant au dessinateur, Djibril Morissette-Phan, il est Montréalais. J'avoue avoir été particulièrement séduit par son trait qui est d'abord un dessin N&B sur lequel on apporte ensuite de la couleur, celle-ci variant à mesure de l'histoire pour donner des tonalités adaptées aux phases du scénario.</p>
<p>Bref, une belle réussite qui vaut le détour et nous permet, au-delà de la distraction, de réfléchir quand même à ces fichues cryptomonnaies...</p>
<p>Tristan Roulot et Djibril Morissette-Phan, <a href="https://www.lelombard.com/bd/crypto-monnaie/crypto-monnaie">Crytpomonnaie, le futur de l'Argent</a>, Le Lombard, 2019.</p>
<p>O. Kempf</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2019/07/26/Cryptomonnaie-%28Morissette-et-Roulot%29#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2259La dalle rougeurn:md5:89354945ac86673bea147ab35c83eebe2019-04-21T18:27:00+01:002019-04-21T18:27:00+01:00Olivier KempfBDBDHistoireRésistance<p>Les BD politiques sont un genre difficile. Trop souvent en effet elles récitent une vision de l’histoire ou des événements qui est partiale, puisqu’au service d’une lecture et donc d’un parti-pris. Bref, on y voit rarement de nuances ou d’ambiguïté. Aussi sont-elles souvent décevantes. Tel n’est pas le cas de cet album – à ma surprise, confessons-le.</p>
<p><img src="http://bdi.dlpdomain.com/album/9782803672714/couv/I325x456/histoire-france.jpg" alt="" /></p> <p>En effet, tout part de deux auteurs de BD (Thomas Kotlarek et Jef) qui constatent une perte généralisée de sens et du détricotage de structures sociales. Ecoutant Michel Onfray, ils le contactent et celui-ci répond favorablement à leur projet, qui est donc initié avant le début du mouvement des Gilets Jaunes.</p>
<p>C’est d’ailleurs ce qui rend l’album si intéressant. Voici en effet le premier tome d’une pentalogie qui nous emmènera jusqu’à notre environnement. Mais si l’action se passe au présent, les quatre premiers tomes sont organisés en flash-back, d’où le nom de la série « Une histoire de France ».</p>
<p>Le premier tome dont il est question s’organise autour de l’arrestation d’un vidéaste de 30 ans qui a filmé, par hasard et avec un drone, un attentat s’étant déroulé à Lyon. Comme il est anarchiste et que la vidéo a été diffusée sur les réseaux sociaux, on le soupçonne de complicité et il est arrêté, son nom étant soumis à la vindicte populaire. Le volume raconte les efforts de son avocat pour trouver des éléments le disculpant, en allant notamment voir ses grands-parents. Or, ceux-ci ont été des résistants pendant la Deuxième Guerre mondiale.</p>
<p>C’est ici que le livre est le plus convaincant. D’abord, parce que les personnages ne sont pas caricaturaux et que les fêlures, les hésitations, les paradoxes se font jour. On est donc loin de l’habituel tableau de la période où tout est en blanc et noir. Cela est vrai de l’époque, mais aussi des personnages du monde actuel, à l’image de l’avocat, habitué des codes parisiens contemporains, au-delà du germano-pratisme et du boboisme qui relativisent tout en assénant pourtant des hectolitres de moraline : peu à peu, on le sent évoluer. C’est enfin vrai de la résistance telle qu’elle est évoquée, une résistance lyonnaise qui n’est pas celle bien connue de Jean Moulin, mais de la galerie Folklore, autour de personnages comme René Leynaud, Jean Martin, Marcel Michaux et avec la présence d’un Albert Camus qu’on ne savait pas avoir été en ces lieux.</p>
<p><img src="https://www.bdgest.com/prepages/Planches/2669_P13.jpg?v=1553355914" alt="" /></p>
<p>Le dessin est intéressant, travaillé avec pourtant une volonté de ligne claire. J’ai apprécié la composition des scènes. Le rendu des visages est assez déroutant mais convainc peu à peu, notamment dans le très bon travail de rendu des visages à 50 ans d’écart : reconnaître le visage de la fraiche jeune fille dans celui de la grand-mère ridée (idem pour le personnage masculin) constitue une prouesse de dessin rarement vue et ici très bien rendue.</p>
<p>Bref, je me méfiais un peu et en refermant le livre, je suis convaincu. Belle histoire, assez subtile, qui anime une vraie BD et non pas un pamphlet militant.</p>
<p><a href="http://www.lelombard.com/albums-fiche-bd/histoire-france/dalle-rouge,3821.html">La dalle rouge</a>, éditions du Lombard.</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2019/04/21/La-dalle-rouge#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2246Maïdan in loveurn:md5:260ee60ec3f46cdf842c578e8fe882ab2019-03-27T09:03:00+00:002019-03-27T09:28:32+00:00Olivier KempfBDBDMaïdanUkraine<p>La BD peut-elle aborder le genre géopolitique ? On connaît des BD politiques, des BD historiques mais des BD géopolitiques sont plus rares. C'est bien pour cela que cet album attire l'attention et, à la lecture, mérite le détour : car en plus, c'est une bonne BD.</p>
<p><img src="http://www.egeablog.net/public/.MAIDAN_LOVE_T1-RVB_m.jpg" alt="MAIDAN_LOVE_T1-RVB.jpg" style="display:table; margin:0 auto;" title="MAIDAN_LOVE_T1-RVB.jpg, mar. 2019" /></p> <p>L'histoire évite surtout le manichéisme qu'on a trop entendu à l'époque dans les médias. C'est d'ailleurs la principale réussite du livre : montrer que tout le monde est un peu dépassé et que les certitudes craquèlent face à la réalité.</p>
<p>Le héros est un apprenti Berkout (CRS ukrainien) qui suit sa petite amie, fille d'ouvrier qui fait des études de sciences politiques et fréquente donc la jeunesse "éclairée" de Kiev. Les émeutes éclatent en 2014 et Bogdan perd la trace d'Oléna. Du coup, il fait tout pour la retrouver, allant jusqu'à la place Maïdan après une série d'aventures haletantes. Une histoire d'amour dans la grande histoire ce qui l'humanise. Bref, le scénario évite d'une part le didactisme, d'autre part la mièvrerie à contre-emploi.</p>
<p><img src="https://img.lght.pics/eKY8.jpg" alt="" /></p>
<p>Le rythme y est et l'histoire montre que rien n'est simple, qu'il n'y pas pas des bons contre des méchants (même s'il y a de vrais méchants). De nombreux personnages secondaires viennent enrichir ce portrait général, pour appuyer cette diversité. Le dessin m'a paru original, mélange de ligne claire et d'inspiration américaine (notamment dans le traitement des couleurs, sachant que l'essentiel de la BD se passe de nuit). ON sent qu'il s'est éclaté à rendre le désordre confus de la place Maïdan, qui donne lieu à des scènes épiques et bien rythmées.</p>
<p>Au final, une belle réussite : le deuxième et dernier tome est prévu pour 2020.</p>
<p>Lire aussi : <a href="https://www.20minutes.fr/arts-stars/culture/2478143-20190321-maidan-love-amour-contrarie-entre-flic-manifestante-pendant-emeutes-kiev?xtor=RSS-176">Entretien</a> avec Aurélien Ducoudray, le scénariste.</p>
<p>Aurélien Ducoudray et Christophe Alliel, <a href="https://www.angle.fr/bd-maidan-love-tome-1-9782818966907.html">Maïdan in love</a>, Bamboo, Grand angle, 2019.</p>
<p>O. Kempf</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2019/03/27/Ma%C3%AFdan-in-love#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2240Le pays des purs (Caron, Maury)urn:md5:a9ed6d23713fefb595478dd9e0ea83852017-08-31T10:19:00+01:002017-08-31T10:19:00+01:00Olivier KempfBDBDBhuttoPakistan<p style="text-align: justify;">La mode est aux romans graphiques : pas vraiment des BD, pas non plus un roman ou un essai. Le genre est fort agréable car il permet d'aborder une question sérieuse avec la force de l'image. Dans l'exemplaire de ce jour, il s'agit des aventures d'une photo-journaliste, Sarah Caron, qui conte ses reportages au Pakistan en 2007 : comment elle rencontre Benazir Bhutto quelques jours seulement avant qu'elle soit assassinée, mais aussi comment elle monte dans les régions tribales autonomes à la frontière de l'Afghanistan pour rencontrer un leader politique proche des talibans.</p>
<p style="text-align: justify;"><img alt="cliquez ici pour voir en grand" src="http://www.la-boite-a-bulles.com/img/albums/9782849532829/couv_9782849532829_petite.jpg" /></p> <p style="text-align: justify;">Voilà en effet une des choses les plus intéressantes de cet ouvrage : il montre la complexité de la société pakistanaise, aussi bien dans les villes que dans les campagnes.</p>
<p style="text-align: justify;">Ainsi, on voit bien la différence entre Islamabad et Rawalpindi (la capitale administrative) mais aussi les réactions de la rue ou encore les vanités de l'entourage de Benazie Bhutto. De même, dans les campagnes, on sent le tiraillement d'une population écartelée entre la pression des talibans et la recherche d'un mode de vie juste et équitable.</p>
<p style="text-align: justify;"><img src="http://www.la-boite-a-bulles.com/img/albums/9782849532829/9782849532829_TN_1.jpg" /></p>
<p style="text-align: justify;">Ces découvertes sont très bien servies par l'histoire mais aussi par un dessin qui sait croquer expressions et paysages, situations et psychologies. Signalons qu'Hubert Mauray est un cyrard, reconverti dans la diplomatie et désormais se consacrant à plein temps à sa vraie passion, le dessin.</p>
<p style="text-align: justify;">Voici donc un utile contrepoint aux articles savants ou aux déclarations àl'emporte-pièce sur le pouvoir pakistanais.</p>
<p style="text-align: justify;">S Caron et H Maury, <a href="http://www.la-boite-a-bulles.com/album-276-le-pays-des-purs-">Le pays des purs</a>, La boite à bulles, 2017, 25 €. 4<sup>ème</sup> de couverture : <font size="2"><font face="Geneva, Arial, Helvetica, sans-serif"><font color="#666666">Le 27 décembre 2007, la ville de <strong>Rawalpindi</strong>, <strong>au Pakistan, est la proie de violentes émeutes, suite à l’assassinat de Benazir Bhutto</strong>, principale opposante au régime en place.</font></font></font> <font size="2">Dans la foule, <strong>Sarah Caron</strong>, photographe française, <strong>saisit avec son appareil les moindres détails de la scène</strong>. Mais très vite, la jeune femme est repérée et se retrouve poursuivie, craignant pour sa vie. <strong>Un mois plus tôt, Sarah rencontrait Benazir Bhutto</strong> afin de réaliser une série de portraits commandée par le magazine Time. Une entrevue difficilement décrochée et qui, par un pur hasard, survenait le jour même de l’assignation à résidence de l’opposante. <strong>Une aubaine pour Sarah : pendant 4 jours, elle se retrouvait aux premières loges de l’actualité !</strong> De jour, elle mitraillait les lieux, de nuit, elle transférait ses clichés.</font> <font size="2">En immersion totale et au gré des commandes, la jeune femme passe cette année-là <strong>du monde de l’élite pakistanaise à celui des talibans</strong>, avec l’aide d’un fier guerrier pachtoune. <strong>Son objectif est une arme</strong> dont elle se sert pour frapper les esprits et franchir les frontières, qu’elles soient physiques ou culturelles, <strong>et ce malgré le danger </strong>des lieux et des situations.</font> <font size="2"><strong>Une immersion sous-tension dans le hors-champ du reportage photographique, vu sous toutes ses coutures.</strong></font></p>
<p style="text-align: justify;">O. Kempf</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2017/08/26/Le-pays-des-purs-%28Caron%2C-Maury%29#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2148Castillonurn:md5:171cc9dd662e12e1123f9a98adedd3922016-10-23T21:59:00+02:002016-10-23T21:59:00+02:00adminBDAngleterreBDFranceHistoireHistoire militaire<p>Vous ai-je déjà parlé de Castillon ? Vous savez, cette victoire française sur l’Angleterre qui mit fin à la guerre de cent ans. Celle dont on ne se souvient pas alors que chacun se remémore Azincourt. Une victoire curieusement négligée alors pourtant que c'est une grande victoire, mais pas dans l'air du temps du déclinisme français. Une récente BD (<a href="http://www.editions-delcourt.fr/serie/champs-d-honneur-castillon-juillet-1453.html">Castillon, juillet 1453</a>) lui fait justice et nous apprend bien des choses qui vont au-delà de l'ultime combat qui pourrait paraître n'avoir d'autres signification que symbolique. Car Castillon est aussi une victoire importante dans l'art de la guerre...</p>
<p><img src="http://www.editions-delcourt.fr/images/rsz/be/be1d86046f41ec979b4286891b74245b.jpg" alt="" /></p> <p>Une BD peut ainsi nous en apprendre énormément sur notre histoire militaire. Certes, les éditions Delcourt se sont régulièrement signalé par la qualité de leur production. Et comme d'autres maisons, sur ce blog mentionnées, elle ouvre une série "historique", mais d'histoire sérieuse. Ainsi, cette collection "champs d'honneur" est scénarisée par Thierry Gloris de formation historienne.</p>
<p>Qu'apprend-on ? Tout d'abord, que Charles VII n'est pas le demi-fou qu'on nous a si souvent dépeint en contant l'épopée de Jeanne d'Arc. Dissimulateur, volontaire, déterminé, voici un roi qui a de la trempe, veut réunir son pays et est capable d'affirmer "La victoire finale appartient à celui qui réussit à imposer la paix". Citation bien sûr apocryphe mais utile en ces temps où l'on s'interroge sur ce qu'est la victoire, je vous en parlerai quelque jour.</p>
<p>Ensuite, qu'il y a déjà une sorte de nation française qui s'oppose à la juxtaposition de régions, sur lesquelles les godons n'ont cessé de jouer : Armagnacs, Bourguignons, Bretons, Gascons. Charles VII tire profit d'un sentiment "national" (révélé par Jeanne ?) et l'on croit voir déjà Louis XI.</p>
<p>Enfin, le plus important : cette victoire est celle de l’artillerie. Alors qu'Azincourt fut la victoire des archers anglais, mettant bas la chevalerie française, voici la réponse du berger à la bergère : Les bouches à feu des frères Bureau permettent non seulement à Charles VII de reconquérir la Normandie en 1449 puis de reprendre le royaume en deux ans, elles jouent un rôle essentiel, en 1453, quand les Anglais font une ultime tentative de reprendre pied en Guyenne. Croyant assiéger les Français, ceux-ci les fixent puis les réduisent peu à peu jusqu’à ce qu'une ultime charge de cavalerie emporte la décision. Les nobles chevaliers croient avoir tout fait, continuant de mépriser ces hommes de peu que sont les servants de bouches à feu. Pourtant, à Castillon, ils viennent de remporter une des premières victoire de l’artillerie française.</p>
<p><img src="http://static.planetebd.com/dynamicImages/album/page/large/30/36/album-page-large-30361.jpg" alt="" /> <a href="http://static.planetebd.com/dynamicImages/album/page/large/30/36/album-page-large-30361.jpg">source</a></p>
<p>Ils ne mettent pas seulement un terme à la guerre de cent ans (du moins sur le champ de bataille, puisque la paix de Picquigny n'est signée qu'en 1475), ils signent là une de ces révolutions militaires qui sont rares dans l'histoire: celle de la bascule d'un ordre militaire vers un autre. Castillon est la fin de la chevalerie, plus de cinquante ans avant Marignan où le roi de France se fit adouber chevalier : persistance du mythe mais inéluctabilité du changement. A Castillon, Henri six aurait pu dire, avec quelques siècles d'avance sur l'Allemand : "l'artillerie française, je la hais".</p>
<p>Mais à l'époque, on n'a pas conscience de ce bouleversement, ni même d'avoir livré la dernière bataille de la guerre de cent ans. La faible réputation de Charles VII fit le reste et les historiens oublièrent Castillon, qui n'appartient pas au chant national, alors qu'elle y prétend amplement.</p>
<p>C'est tout le mérite de cette BD que de nous montrer tout cela : un solide dossier historique, un scénario agréable, des personnages avec du relief, des dessins attachants et convaincants. Bref, une belle réussite.</p>
<p>A. Le Chardon</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2016/10/23/Castillon#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2568Château Bordeauxurn:md5:0262ca05d57202d3c0926b3fda13b7702014-10-10T20:14:00+02:002014-10-10T22:47:10+02:00adminBDBDBordeaux<p>Voici une série commencée en 2011 et qui en est aujourd'hui à son cinquième tome. Je n'ai lu pour l'instant que le deux premiers, suffisamment séduisants pour que je vous en parle avec plaisir, savourant par avance les prochaines lectures. Et exceptionnellement, je n'achète pas la série d'un coup mais tome par tome, séparant chacun de trois à quatre semaines, afin de déguster une histoire longue en bouche et pleine de rondeurs, comme il se doit. Ma façon à moi de célébrer la nouvelle série de billets sur Echoradar (intitulée radar à bulles), qui sera consacrée aux BD et à laquelle je contribuerai, évidemment : en attendant, vous pouvez toujours aller lire "<a href="http://echoradar.eu/2014/10/09/191/">Malouines, le ciel appartient aux cobra</a>". Mais loin de l'Atlantique sud, revenons à Bordeaux.</p>
<p><img src="http://www.bedetheque.com/cache/thb_couv/Couv_122123.jpg" alt="" /> <a href="http://www.bedetheque.com/serie-26874-BD-Chateaux-Bordeaux.html">Source</a></p> <p>Quelle est l'histoire ? Une jeune femme rentre à Bordeaux pour l'enterrement de son père, dans le "château" familial. Elle travaillait aux États-Unis depuis dix ans, rompt avec son fiancé et employeur, et décide du coup de reprendre la propriété familiale, ce que ses deux frères acceptent du bout des lèvres. Elle va se heurter à de nombreux obstacles, le premier étant que la propriété fiche le camp tandis que les passions s'affrontent.</p>
<p>Au début, j'ai craint un peu une BD publicitaire comme en produisent les syndicats d'initiative. Et puis non : si le scénario est très documenté, il ne s'agit pas d'une œuvre à visée pédagogique mais d'une vraie histoire. En fait, c'est même cela qui m'a séduit : un certain réalisme qui montre des affaires familiales, des bassesses et des jalousies, des solidarités et des affections, le rythme des affaires enfin avec son environnement économique. Au-delà, l'héritage n'est pas simplement une affaire patrimoniale mais alterne les souvenirs d'enfance et la longue histoire, remontant au XVII° siècle. Bref, une sorte de saga familiale qui fait de loin penser aux Maîtres de l'orge, que j'avais beaucoup apprécié en son temps.</p>
<p><img src="http://www.bedetheque.com/cache/thb_series/26874_pl.jpg" alt="" /></p>
<p>Ce mélange composite est très réussi et évite surtout les artifices habituellement retenus pour attirer le chaland. Pas de meurtre grossier, pas de scène simili sensuelle, mais au contraire une retenue et une vie qui s'expose tout en retenant l'intérêt par l'intrication subtile d'un scénario composé. Bref, pas de facilités.</p>
<p>Les dessins sont solides et clairs, avec quelques initiatives de cadrages qui donnent de temps à autre un peu de fantaisie dans l'ordonnancement.</p>
<p>Au fond, un Bordeaux : cadré, bien sûr, mais avec de multiples touches qui dessinent un paysage et des pointes d’originalité qui détonnent en donnant du contraste pour ne pas en faire un simple truc BCBG.</p>
<p><a href="http://www.glenatbd.com/bd/chateaux-bordeaux-tome-1-9782723472814.htm">Châteaux Bordeaux</a>, par Corbeyran et Espé, chez Glénat</p>
<p>A. Le Chardon</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2014/10/10/Ch%C3%A2teau-Bordeaux#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2440Jaurès (Morvan, Voulyzé, Macutay & Duclert)urn:md5:d3187bbfa1168c4353ce34345a66cf922014-09-18T22:21:00+02:002014-09-18T22:21:00+02:00adminBDBDHistoireJaurès<p>Cette BD tente de répondre à une double question :</p>
<ul>
<li>Comment écrire des BD historiques qui soient exactes, vues de l'historien, et non simplement des prétextes à des aventures sympathiques mais anachroniques ?</li>
<li>Comment rendre un personnage qui a surtout marqué par ses écrits et ses discours, à savoir Jaurès, grand tribun avant d'être l'homme politique assassiné que l'on sait ?</li>
</ul>
<p>La BD que je présente ce soir tente de répondre à cette problématique.</p>
<p><img src="http://www.glenatbd.com/images/albums/9782344001103/9782344001103-L.jpg" alt="" /></p> <p>La vérité historique pose un premier problème. Ou plus exactement, le respect d'un certain état des connaissances tel qu'il est appréhendé par les historiens, aujourd'hui. Pour cela, un historien de métier est dès le départ associé à l'écriture (ce qui explique le nombre de coauteurs de l'album). Il s'agit ici de V Duclert qui patronne l'ouvrage et écrit le dossier documentaire de la fin. Ceci explique également que la BD soit publiée par un éditeur de BD (Glénat) et un éditeur d'histoire (Fayard).</p>
<p>Mais du coup, comment rendre la vie d'un homme "historique" qui n'a à son actif presque aucun événement évocateur, sinon le fait qu'il est assassiné la veille de la déclaration de guerre ? Comment bâtir un scénario sur un assassinat ? Surtout quand l'homme assassiné est d'abord un homme de mots et de paroles, non d'actes et d'aventures ?</p>
<p>Sans surprise, les deux scénaristes (il fallait bien ça) organisent le récit autour du mois de juillet 1914 qu'ils entrecoupent de flash-back. Comme cela risquait de ne pas suffire, ils y ajoutent un suspense autour de la famille de l'assassin, de façon aussi à montrer l'adversaire. Convenons en : si le résultat est habile, si la BD se lit sans déplaisir, elle n'est pas trépidante. Elle n'intéressera donc que les amateurs d'histoire, non ceux d'histoires.</p>
<p>Mais elle a le grand mérite de restituer la parole et donc la pensée de Jean Jaurès. Tout d'abord son approche "pacifiste" de 1914 : je mets le mot entre guillemets car il n'a, à l'évidence, pas la même signification qu'aujourd'hui. Mais aussi son approche socialiste et internationaliste, telle qu'elle pouvait exister en 14 avant l’éclatement du Congrès de Tours en 1920 et l'expérience communiste tout au long du XXe siècle. On se rend compte de l'humanité familiale de l'homme, bon vivant, très cultivé (normalien et agrégé), amateur de bonne chère et de primitifs flamands. Enfin, on découvre quelques clichés : le rôle tenu lors de la grève des mineurs à Carmaux, la création de l'Humanité mais aussi le discours tenu au pré Saint-Gervais, en 1913, devant 150 000 personnes, sans sonorisation : on a peine à imaginer la puissance oratoire qu'il fallait alors déployer pour convaincre. Désormais, le moindre âne ânonnant son prompteur et récitant des euh tous les trois mots réussit à être un "homme politique d'envergure nationale" (cas à droite comme à gauche).</p>
<p>Enfin, cela donne l'occasion de lire des textes de Jaurès et donc d'aller au-delà de l'iconographie habituelle pour rencontrer l'homme au travers de ses écrits, pas seulement de sa légende.</p>
<p>L'ouvrage vaut donc le détour car il constitue une biographie illustrée qui renouvelle le genre de la BD et de la biographie. Loin d'une biographie complète, bien sûr, mais suffisamment sérieux pour que l'on s'éduque avec plaisir. Pour compléter, on lira le <a href="http://lignestrategiques.blogspot.be/2014/08/aujourdhui-la-paix-demain-la-guerre.html">billet de Lignes stratégiques consacré à la lecture de L'armée nouvelle de J Jaurès</a>.</p>
<p><a href="http://www.glenatbd.com/bd/jaures-9782344001103.htm">Jaurès</a></p>
<ul>
<li>Glénat et Fayard</li>
</ul>
<p>A. Le Chardon</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2014/09/18/Jaur%C3%A8s-%28Morvan%2C-Voulyz%C3%A9%2C-Macutay-Duclert%29#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2434