Pensées fugaces

Ce qui s'est passé cette semaine restera incontestablement dans l'histoire contemporaine. Je ne sais si c'est un tournant (discussion avec des amis étrangers pour savoir si c'était un "turning point" ou un "milestone"...) mais il y aura un avant et un après 7 janvier. A bien des égards, ce n'est pas vraiment un "11 septembre français" : la vigueur de la réaction mondiale et française a été différente. 4 millions de personnes dans les rues, des chefs d’État et de gouvernement du monde entier défilant eux aussi, cela constitue quelque chose de différent.

L'origine est aussi différente. Le 11 septembre, les terroriste venaient de l'extérieur, la réaction s'est portée vers l'extérieur. A Paris, les agresseurs venaient de l'intérieur, avec des liens évidents à l’extérieur. Une forme nouvelle de mondialisation de la crise. Il ne s'agit pas simplement de "terrorisme" ou de "jihadisme" mais aussi de l'intégration des dangers, de façon encore plus nette qu'avant.

Je suis frappé de l'ampleur de la réaction : c'est parce que ça s'est passé à Paris qu'il y eut autant d'émotion mondiale (sans compter la durée de l'événement, étalé sur trois jours) et qui explique la "négligence" envers ces victimes d'attentats qui ne cessent de tomber, en nombres très massifs, ailleurs. Cette fois, l'Occident s'est senti touché. Ceci explique la différence disproportionnée des réactions. Et la gêne de tout un tas de pays du "non Occident" qui ont bien sûr condamné les attentats, mais ont bien vu qu'une vie de Français ne valait pas une vie d'Irakien, de Nigérian, de Syrien.

Ici, remarquons que la vision du policier abattu qui a circulé sur les réseaux sociaux a modifié radicalement la perception et la charge émotive. Pourtant, il ne s'agit pas simplement d'une dramaturgie médiatique. Les symboles (un peu Charlie Hebdo, mais surtout Paris) ont marqué, cristallisant des angoisses qui ne cessent de monter depuis des années en Europe : qu'on pense à la montée des partis anti-immigrés y compris dans des pays en ayant peu, comme dans les pays scandinaves.

Beaucoup de débats sur "Je suis Charlie" ou "Je ne suis pas Charlie". Le slogan est maladroit. Personnellement, je n'aime pas Charlie et ne l'ai pas trouvé très drôle. Pourtant, il ne s'agissait pas de défendre "Charlie" mais surtout d'affirmer la cohésion nationale, face à l'attaque. Quand on se fait agresser, quand l'ennemi vous désigne comme ennemi, il faut faire bloc. C'est le seul sens à cette journée de mobilisation, qui dépasse Charlie même si celui-ci a pu servir de support à la mobilisation générale. Je n'ai pas vraiment défilé pour Charlie, mais pour la France qui permette aussi que des journaux comme Charlie, que je n'aime pas, existent. J'ai aussi défilé pour les anonymes qui sont tombés, et pour les forces de l'ordre. Faire bloc.

Les "Je ne suis pas Charlie" soulèvent pourtant des vraies questions : qu'il s'agisse de ceux de droite ou des musulmans. Car la liberté d'expression est-elle une liberté d'injure ? Sommes nous collectivement aussi tolérants que nous nous plaisons à nous le dire ? N'y a-t-il pas tout un tas de cas de censure, d'ailleurs justifiées, en France ? Tout est-il dicible ? On parle beaucoup de "respect" : Peut-on accepter l'irrespect systématique ? Est-ce la meilleure façon d'encourager le "vivre ensemble" et d'aider à résoudre nos problèmes communs ? Surtout quand CH est connivent avec l'établissement du moment ? Aller manifester, certes, pas forcément "pour" CH, mais pour la France.

Je crains que ce moment ne dure pas, car il demeure énormément de failles dans cette unanimité. Le débat autour de CH en est un. Nous aurons très bientôt le débat renouvelé entre sécurité et liberté. Nous aurons surtout la question de l'assimilation, donc de l'école et surtout de notre système économique. Quand il y a des millions de chômeurs depuis des années, que les "jeunes des banlieues" ne se voient rien proposer, quand le système ne sait trouver que l'austérité comme réponse à la crise, on reste très inquiet.

Unanimité des Européens ? Qu'ils viennent défiler à Paris ne coûte rien, ne présente que des avantages médiatiques. C'est au pied du mur qu'on voit le maçon : que va proposer l'Europe ?

Articles, sites et liens

• Why Our Space Systems Need an Upgrade
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• Charlie Hebdo : Le crime est inacceptable, le blasphème aussi, assurent des dignitaires sunnites libanais
• Très profonde « Lettre ouverte au monde musulman » du philosophe musulman Abdennour Bidar
• Gorbachev warns of major war in Europe over Ukraine
• Pentagon Claims Advances in War on the Islamic State

Événements

28 janvier L’Association IHEDN REGION PARIS Île-de-France vous invite le 28 Janvier 2015 à partir de 18H30 à une conférence sur l'Armée de l'Air. Il est apparu intéressant, après la parution en 2013 du nouveau Livre Blanc sur la Défense et la Sécurité nationale et l’adoption en décembre dernier de la Loi de Programmation Militaire pour 2014-2019, de faire un point sur chacune des Armées : Qu’en est-il de leurs capacités réelles, quels modes opératoires conservent-t-elles et quelles sont leurs perspectives ? Accueil et présentation par: Le Général de corps aérien Patrick CHARAIX Ancien Commandement des Forces Aériennes Stratégiques de l’Armée de l’Air (septembre 2012 - août 2014) La conférence sera introduite par: Le Général de corps d’armée Bernard de COURRÈGES d'USTOU Directeur de l’Institut des Hautes Études de Défense Nationale et de l’Enseignement Militaire Supérieur Conférence gratuite du mercredi 28 janvier 2015 de 18H30 à 20H00 École Militaire – Amphi des Vallières. Inscription

3 février Club Démocraties (Général Paris), Gaz de schiste, Prométhée ou Satan ? par Olivier Appert délégué général de l’Académie des Technologies, le mardi 3 février 2015 à 19h30 au Cercle des Universitaires 12 rue Clément - 75006 Paris (métro Mabillon). S'inscrire au près de Démocraties.

4 février 1ère édition de la Conférence parlementaire sur la Sécurité qui se tiendra le mercredi 4 février 2015 à partir de 8h30 à la Maison de la Chimie (Paris 7ème). Présidée par Olivier MARLEIX, député de l'Eure-et-Loir, cette matinée-débat aura pour thème : Comment développer notre industrie de pointe pour la sécurité de demain ? Les débats de la matinée s'articuleront autour des trois tables rondes suivantes : - Approche prospective : quelles conditions pour transformer l'exigence de structuration du marché en une réalité économique et politique ? - Deux preuves de filières : quels enseignements tirer de ces retours d'expérience ? - A la conquête de nouveaux marchés ! Vous pouvez vous inscrire en ligne sur notre site internet et consulter le programme de l'événement.

A. Le Chardon